Et ainsi les Légions du Phénix s'en virent-t-elles à nouveau à la guerre en Eternia sous le ciel, contre les armées des profondeurs assemblées contre l'Empire et tous les vivants à la surface du monde. Elles étaient fières et puissantes, ces Légions, soldats d'élite aux rangs des Maudits, seigneurs de la guerre sous l’égide de l'Oiseau qui les guidaient tous. Et si terribles étaient les armées de Lloth, en vérité, elles ne comptaient au final que soixante milles véritables guerriers. Soit vingt milles de moins que les envoyés du Flamboyant, qui pouvaient de plus compter sur l'aide des forces d'Akila le Dieu Maudit aux ailes noires, qu'ils auraient dû combattre à l'origine en faisant en ce lieu. Mais de telles subtilités n'aurait su troubler les Légions immortelles, qui obéissaient avec zèle et dévouement aux commandements de la Flamme Vivante qui les avaient ramenés de l'Outre-Monde, plusieurs fois même pour certains d'entre eux. Et si tortueux que fussent ces desseins, ils s’y conformeraient tout de même, envers et contre tout.
Les Armées de Lloth assaillaient la Citadelle, aussi les forces du Phénix les prient-elles par les flancs, enfonçant les lignes de Kobolds comme du beurre pour venir se heurter aux véritables troupes de la Déesse-Araignée. Menant l'assaut venaient les Seigneurs Vampires, terribles dans leurs armures complètes, vifs, rapides, terribles, ne trouvant leur pareille que face aux plus puissants des guerriers des profondeurs. Leurs longues épées étincelaient, et brillantes les pointes de leurs lances gracieuses. Cruelles leurs haches courtes aux lames recourbées, qui fauchaient membres et vie dans un jaillissement de sang, et preste leurs écus qui s'interposaient entre eux et la mort. Et le plus terrible de tous était Dalarya, leur Seigneur et le premier d'entre eux, qui menait l'attaque des siens, à la pointe de l'assaut qui était le fer de lance des Légions du Phénix dans cette configuration. Aucune lame n'était assez rapide, aucune armure assez solide, aucune esquive assez parfaite, pour échapper à ses coups vicieux et précis, flou aux yeux mortels qui tentaient de les suivre, sa lance s'enfonçant diaboliquement entre les côtés, trouvant les failles dans toutes les défenses, son épée décimant les rangs de ses ennemis tout en parant leurs attaques.
Derrière les Vampires venaient les Squelettes, menés par leur propre Seigneur, qui était un maître des combats au sol, dans leurs armures frappées du symbole de leur Maître. Et chacun d'eux avait été un guerrier de premier ordre dans la vie, et chacun d'eux s'était encore longuement entraîné dans la mort. Ils élargirent la brèche creusée par les Vampires, solidifièrent le front, engagèrent à leur tour le combat. Parallèlement, les Goules s'abattirent en riant de leur ricanement terrible et sans âme sur les rangs des Kobolds, profitant de la faiblesse de ses êtres pathétiques pour faire leur festin, augmentant leurs forces et leurs capacités de résistance au fur et à mesure qu'ils dévoraient âme et corps, devenant plus redoutables encore pour les ennemis plus sérieux qui viendraient après eux. Et puis soudain des sillons plus profonds se tracèrent dans les rangs des misérables créatures, alors que les Nécrophages les traversaient pour aller chercher l'armée adverse, dévorant tout ce qui était mort ou vivant dans les forces de la Déesse-Araignée, véritables machines de guerres à la faim infinie.
Pendant ce temps, venant derrière les Squelettes, la masse compacte et inexorable des Zombis fini de stabiliser le front, créant une barrière solide contre les ripostes adverses. Alors seulement les Fantômes et autres Spectres s'en vinrent-ils à l'assaut, dans un rugissement de fin du monde, s'abattant lugubrement sur le sol comme dans les cieux, frappant directement les esprits de leurs ennemis, aussi redoutables qu'aucun autre dans les Légions du Phénix. Et ce n'était pas rien, les hordes de Lloth s'en rendaient compte à présent que tous les guerriers de la Flamme Vivante et Éternelle qui étaient venus sur ce morne champ de bataille, bien loin de celui prévu à l'origine, s'abattaient sur eux dans un fracas terribles, semant la mort dans leurs rangs, ne la craignant pas eux-mêmes car leur Maître et ses Servants finiraient toujours par les faire revenir à la vie... alors qu'aucun autre ne le pourrait jamais. Un atout aussi précieux face aux Drows venus des profondeurs du monde qu'il ne l'avait été face à Akila un peu plus tôt.
Et ce n'était pas tout, et ce n'était pas encore fini. Car, menés par Lyvirian, leur Seigneur, les Maîtres-Liches eurent tôt fait de contrer et de repousser les sortilèges des Elfes Noirs, prouvant qu'ils n'avaient rien à envier aux peuples des profondeurs en ce domaine. Et les morts les renforçaient, et ils devenaient de plus en plus puissant à mesure qu'on tuait et mourrait pour l'Oiseau de Feu. Le Seigneur-Liche lui-même était le plus terrible d'entre tous, ses sortilèges étaient les plus puissants, mais aussi, voir même surtout, les plus subtils, les plus vicieux. Même face aux Drows, pourtant passés maître dans la fourberie, il parvenait à trouver chaque faille, retourner chaque faiblesse contre ses ennemis. Protégés par les Légions, et surtout par la dernière immense vague de Zombis, ils s'en donnaient à cœur joie, couvrant autant les leurs que leurs alliés du moment, les forces d'Akila le Maudit. Les Serviteurs de l'Oiseau ne se souciaient point de qui étaient leurs alliés, au fond. Ils auraient même pu combattre aux côtés des séides de Lloth, si les circonstances avaient été autres. La mort pardonnait tout, et la Flamme également. Or, ils n'étaient que leur vecteur...
Mais même en de telles compagnies, au milieu des Légions et de leurs Seigneurs, des démons appartenant aux armées d'un Dieu, deux guerriers se distinguaient au rang des morts. Le premier était Ral'Dar'Aliarion, Champion des Légions du Phénix et de l'Oiseau lui-même. Sa lame créait le vide autour de lui, et ses vagues de ténèbres et de flammes noires défaisaient même les Démons les plus puissants qui tenaient de l'assaillir. Guerrier et Mage terrible, il se taillait un chemin sanglant dans les armées de la Déesse-Araignée, sans crainte, sans pitié, sans effort. Nul ne pouvait se dresser devant lui, car le Champion de Lloth se trouvait au prise avec un Dieu, et que seul de toute la troupe des profondeurs il aurait pu lui faire déployer toute son adresse et son habilité. Sans se troubler, sans marquer de pause, il trancha un deux un immense Démon qui se plaçait devant lui, sa lame poursuivant sa course pour décapiter trois Drows en un mouvement tournant, alors qu'il écrasait la vermine de Lloth de simples mouvements. S'appuyant sur un cadavre, il para un terrible coup de griffe et perça le cœur de celui qui lui avait asséné. Une brèche dans les attaques, un endroit où placer une sphère d'obscurité qui alla s'écraser dans les rangs adverses, y ouvrant un vide bien vite comblé par les remous de la bataille. Et ainsi continua-t-il son avance, insensible guerrier aux pouvoirs terrifiants, renvoyé par la Flamme pour La servir...
Plus terrible encore, plus terrible semblait-il en n'importe quelle compagnie, comme s'il n'avait pu soutenir de comparaison, Volundiar avait retrouvé le ciel, et les Démons n'étaient pas assez féroces pour sa lame, et les sorts n'étaient pas assez forts pour ses flammes. Nul Démon n'était assez fort pour son épée runique, aucun magicien ne parvenait à contrer ses sorts terriblement puissants et vicieux. Parfois, en un piqué cruel, il fondait sur l'armée ennemie, y ouvrant un large sillon de flamme. Mais parce qu'il était ce qu'il était, et aussi ancien que sage en vérité, il savait que cela ne s'arrêterait pas à si peu. La seule armée de Lloth n'était pas de taille. Elle avait moins de combattants dignes de ce nom que la seule Légion, et n'avait pas assez de valeur en ses rangs pour renverser la vapeur, que du contraire. Seulement, autre chose s'en venait... D'une sphère de feu noire, que sa magie faisait naître des ailes de sa monture, il ouvrit une trouée dans le ciel, s'y engouffra, bien décidé à se rapprocher du lieu où il sentait la Magie s'accumuler. Et nul ne pouvait se dresser sur son chemin sans périr, car il aurait fallu un Dieu pour l'arrêter...
Ellianne elle-même avait dû prendre quelques minutes pour se remettre de sa crise de haut-le-cœur. Une fois que tout fut passé, elle enfourcha à nouveau Servarion, son fidèle Aigle Géant, et rejoignit la bataille céleste, ses éclairs se remettant à crépiter et ses orbes de lumière à filer, son nouvel ennemi déchaînant plus encore sa rage et sa haine que l'ancien, car elle savait que contre celui-ci il n'y aurait pas de rémission possible en cas de défaite ici...