Ellianne c'était contentée de rire doucement aux paroles du Général-Commandant, des paroles aussi vides que les précédentes, et aussi vaines, puis de sourire quand Brume annonça au malheureux qu'elle participerait à sa mise à la Question. Après quoi elle indiqua à Brume que oui, elle avait un lieu plus « convivial » à disposition. Et ainsi gagnèrent-ils ledit lieu après que les « accessoires » de la jeune femme soient arrivés, pris en charge par des Gardes Impériaux, tout comme leur future victime. Après quoi tout ce petit monde se mit-il en route vers une autre aile du Palais, une aile qui disposait d'un sous-sol séparé du reste du réseau souterrain par de puissantes grilles et d'épaisses portes, tissées d'enchantements qui étouffaient tous les sons. Certaines choses se passaient derrière ces barrières aux Gardes impassibles, armures d'argent à la lumière atténuée dans l'obscurité, Daknan'gra en poste ici depuis le Gouverneur, hommes étranges qui avaient connu en leur sang la douce brûlure de l'Épice et qui, comme les précédents, avaient juré fidélité au nouveau régime parce qu'il leur convenait. Nombre d'entre-eux portaient le pal à la ceinture, souvenir de temps pas si lointains, en fait, annonce de celui qu'ils servaient au part avant, et subtile déclaration de ce qui se déroulait là... si quiconque avait pu les voir.
Les Gardes ordinaires n'entraient jamais là, et les différents fardeaux de ceux-ci furent transmit à l'entrée. Au rang de ces fardeaux, dotés d'une place de choix parmi eux, Lidian de Brugarne pénétrait en ces lieux pour la première fois... et aussi la dernière. Car s'il ressortait jamais vivant d'ici, ce ne serait que pour aller sur son lieu d'exécution, probablement à l'échafaud, à la guillotine, ou peut-être au Pal, en mémoire d'Amras, sous qui il avait servi. En tous cas, il était condamné, c'était un fait clair pour tous ceux qui descendaient les escaliers de pierre avec lui, des Daknan'gra qui le transportait en ricanant à l'Impératrice qui marchait en tête, en passant pas lui-même et par le Premier Conseiller qui fermait la marche, un léger sourire aux lèvres. Brume aussi devait en être consciente, vu ce qui s'était passé dans la Salle du Trône. Bien rares étaient ceux qui ressortaient vivants de la Question Impériale, encore moins quand Ellianne assistait et participait aux séances. Ainsi en avait-il été avec ses deux prédécesseurs, ainsi en allait-il également avec elle. Et le fait que la Maîtresse des Crocs se joignent à la suzeraine d'Eternia n'était bien entendu pas pour rallonger l'espérance de vie du chien qui l'avait violée quand elle était enfant...
Après avoir descendu les escaliers et passé quelques portes, le petit groupe déboucha sur une vaste pièce aux murs de pierre drapée d'or et de pourpre, dotée d'un tapis confortable, qui auraient pu faire penser à une salle banale du Palais au-dessus sans le sang qui avait éclaboussé l'ensemble, à partir de la table de torture qui se trouvait au centre. De plus, par dessus les draperies se trouvait l'un des plus bel arsenal d'outils de torture du monde connu, constitué par l'Inquisition sous Asahi, enrichit par Amras et Gorath et doté de quelques touches supplémentaires par Ellianne et les siens. Des plus simples instruments humains aux plus vicieux appareils inventés par les Drows, tout était là. Les instruments plus massifs, nécessitant plus de place, avaient été installés dans les pièces communiquant avec celle-ci. Au total, tout ce que l'on pouvait rêver pour faire souffrir autrui se trouvait ici, et les hommes et les femmes qui se trouvaient dans la salle, deux de chaque sexe à cet instant, savaient s'en servir comme de véritables artistes. Tous les quatre étaient terrifiants à leur manière, la Drow aux traits aussi beaux que cruels, le Nain déformé et grimaçant, le Démon sans visage exhalant la malignité ou l'Humaine aux yeux étincelant de ténèbres. Ils s’emparèrent de leur malheureuse victime et la lièrent sur la table, avant de s'écarter, attendant les ordres.
Alors que Medar reculait contre un mur, se positionnant pour l'instant comme simple observateur, Ellianne elle-même se retourna vers Brume, un léger sourire s'étalant sur ses douces lèvres, ses yeux rouges brillant d'une chose indéfinissable mais incontestablement déplaisante pour une personne normale qui serait venue à la lire dans ce regard.
« Est-ce assez « convivial » pour toi ? Je serais curieuse de voir ce que tu as en tête pour notre cher ami ici présent... Oh, et ne t'en fais pas pour les cris. Ils crient tous, mais, étrangement, personne ne les entend jamais... »